Chronique film : Gran Torino
de Clint Eastwood.
Encore plus carte postale, clique image.
C'est avec un grand plaisir qu'on retrouve le grand Clint à l'écran. Vieillissant, certes, mais l'oeil toujours aussi pétillant. Le bougre n'hésite pas se foutre de sa propre gueule avec délectation. Son personnage est vieux, réac, raciste, un chouia nerveux, bref une espèce d'inspecteur Harry décrépit, et donc complètement anachronique. C'est une belle revanche pour lui de jouer des tares dont on l'a souvent accusé, et il s'en donne à coeur joie. Chaque haussement de sourcil, chaque grognement d'ours me faisait bondir de joie de mon fauteuil. Le film est par ailleurs souvent très drôle, et le plaisir communicatif. J'étais par ailleurs un peu soulagée que Clint confie la musique à son fiston, ça nous évite ses sempiternelles 5 notes (jolies par ailleurs) au piano, mais qui commencent à faire long feu.
J'ai récemment vu passer un article sur le site des inrocks fustigeant l'engouement de la critique pour ce film, et contestant l'humanisme du grand Clint. J'avoue ne pas bien comprendre cet acharnement, le film lui permettant de tourner la page Dirty Harry, sans la déchirer. Mine de rien, Eastwood dresse un portrait de l'Amérique, dans tous ses paradoxes, ses composantes. Oui, Dirty Harry et la violence, ce sont aussi des facettes de l'Amérique, et l'immigration et le communautarisme en sont d'autres. Mais le geste final d'Eastwood dans le film permet de dépasser ces composantes et d'affirmer que ok, on a merdé, on merdera encore, mais on peut au moins essayer de transcender tout ça.
L'Amérique de demain ne sera pas celle d'hier, elle est rentrée dans une nouvelle ère, et Eastwood passe le relais à une nouvelle génération. Le beau plan final est à la fois un message d'espoir mais aussi un avertissement : Tao s'enfonce avec la Gran Torino dans un décor de carte postale, une Amérique clinquante, un cliché : Il fait/il est maintenant cette nouvelle Amérique, porteuse d'espoir, mais qui doit se méfier de ne pas retomber dans sa superficialité et son conformisme. Gran Torino est donc un très bon film d'Eastwood, à voir, les yeux grands ouverts (jai rarement écrit un truc aussi kitshcou quand même).